Je l'ai sur le bout de la langue
Isa, ça me trotte dans la tête depuis un certain temps, comme une musique que l’on n’arrive à identifier mais que l’on est sur de connaître. Tu sais, c’est le mot que tu as au bout de la langue mais qui ne veut pas sortir. Le truc qui te triture l’esprit et qui pourtant te paraît évident une fois qu’on te l’as dit. Peut être parce que ce n’est pas un mot mais une pensée complexe et infinie, celle qui parle de la vie qui nous entoure et du monde que l’on souhaite voir demain. Ainsi, cette lettre parle de choses évidentes. Des faits qui nous concernent tous et qui au final sont tellement « acquis » dans notre quotidien que nous n’y pensons même plus. Peut être même n’y avons nous jamais pensé. Comment vivre ensemble ? Que veut dire être une société ? Pourquoi avons nous peur ? Pourquoi le chômage est-il l’obsession ce notre génération ? Ce n’est pas des réponses que je cherche en t’écrivant mais un espace de réflexion, de pensée, de discussion et d’échange pour parfaire ma compréhension du monde qui m’entoure.
Mes études m’ont ouvert des portes sur la complexité de la formation du monde. J’ai appris à en décoder les éléments naturels, ceux que l’on ne maîtrise pas en tant qu’humain comme le climat, la géologie, le cycle de l’eau... Mais qu’en est-il du reste ? De tout ce que l’humain a créé ? Comment l’homme organise t-il son monde (et je dis bien SON monde) pour vivre ? Parfois on se sens grandir, murir, prendre de l’âge, car on a la sensation d’être plus éveillé aux phénomènes qui nous entourent. Tu vois Isa, je pense que je suis en plein d’dans. Depuis quelques temps j’ai la sensation de mieux comprendre l’organisation de notre société, de pouvoir saisir les origines et les conséquences de certaines politiques ou de certains actes sur notre société. J’ai la sensation de replacer dans l’ordre certaines séquences de notre histoire que j’ai pu apprendre au collège ou au lycée mais qui sans accroche dans mon esprit n’ont malheureusement pas pu être mémorisées, comprises. C’est comme si mon cerveau se mettait à tourner un peu plus dans lebon sens, que les engrenages se mettait peu à peu à tourner, me permettant alors de comprendre plus de choses. C’est très agréable tu sais. Mais c’est aussi très effrayant. J’ai la sensation de toucher du doigts un petit bout de l’immense complexité du monde qui m’entoure et en même temps je me rends compte que ça ne sera jamais possible de tout comprendre. Notre société est devenue trop complexe. Dans ces moments là, je me prends d’indulgence pour François Hollande. Je me dis que lui non plus ne doit pas tout comprendre, mais que comme moi il essaye. Car comprendre c’est déjà agir. Expliquer c’est déjà faire. Mais aujourd’hui dire ça ne suffit plus.